Suzy Maestre, Caroline de Seze 3 mars 2020

Si notre objectif est véritablement d’avoir un échange transparent et constructif, nous ferions mieux d’aller voir ce qu’il se passe sur la colline de l’autre. Nous comprendrions peut-être mieux pourquoi l’autre nous reproche de laisser les fruits pourrir sans les cueillir alors qu’ils ne nous paraissent pas encore mûrs.

 

La colline de l’autre

 

Cependant, il ne suffit pas de voir ce que l’autre voit, mais aussi de comprendre ce qu’il ressent. La communication n’est que la partie émergée de l’iceberg de notre intériorité.

La communication non violente (=CNV) propose justement ce retour sur soi pour mieux communiquer entre collaborateurs. Voilà pourquoi la CNV pourrait être votre bonne résolution de l’année ! Pourquoi et comment l’adopter, nous vous expliquons tout !

 

La CNV en entreprise : vous avez tout à y gagner

 

Améliorer sa communication avec la CNV, c’est vouloir :

  • Obtenir une ambiance de travail plus collaborative et apaisée
    “Elle augmente vos chances d’économiser votre énergie, de prendre soin des personnes et de développer une performance globale et durable, car elle favorise des relations de confiance respectueuses de chacun », résume Françoise Keller, formatrice certifiée.
  • Eviter les frustrations et donc anticiper les conflits
  • Rendre abordables les sujets sensibles et les demandes délicates
  • Réduire les risques RH (burn out, turnover, départs par exemple)
    « La prévention et la gestion des conflits avec la CNV sont aussi une démarche de prévention des risques psychosociaux », précise Magali Noaro, coach et formatrice en management relationnel.

En résumé, la communication non violente (CNV) a vocation à soigner la communication en mettant la qualité des relations au centre. Le but est de satisfaire nos besoins ET ceux des autres. Pour cela, M. Rosenberg propose une méthode en quatre étapes qui invite à :

  • Observer les faits
  • Identifier les émotions qu’ils suscitent,
  • Décrypter le besoin qui se cache sous ces émotions
  • Et enfin formuler une demande qui permet de répondre à ce besoin.

Vous allez voir, il n’est pas si compliqué de se plier en 4 !

 

1) Observer les faits (1/4)

 « Quand nous mélangeons observation et évaluation, notre interlocuteur risque d’entendre une critique et de résister à ce que nous disons. », explique Marshall Rosenberg, fondateur de la CNV, dans Les mots sont des fenêtres (ou bien des murs).

L’observation des faits de la façon la plus objective possible est donc la première étape de la communication non violente. On peut s’imaginer plaider dans un tribunal pour trouver les faits les plus neutres possibles, qui ne laisseraient aucun doute aux membres du jury.

Et puis, comme disait Jiddu Krishnamurti, penseur indien et fondateur d’écoles alternatives, « observer sans évaluer est la plus haute forme de l’intelligence humaine » : un joli challenge non ?

2) Ecouter ses émotions = faire preuve d’empathie avec soi-même (2/4)

La seconde étape de la communication non violente consiste donc à déterrer les émotions qui nous sont souvent inconnues, alors même qu’elles sont le principal moteur de nos actions. Une fois que l’on est capable d’identifier l’émotion qui survient face au fait objectif que l’on vient de décrire, on peut la partager à son interlocuteur.

Pour cela, la méthode préconise de s’exprimer à la première personne. En disant « je », j’exprime un sentiment et non un jugement, partant du postulat que l’on connait uniquement ce qui se trouve en nous, et non ce que l’autre peut ressentir. Exemple : « Je ne me sens pas respecté(e)» est très différent de « Tu es un égoïste ». La 1ère formulation invite au dialogue quand la 2nde est une accusation qui peut braquer l’interlocuteur.

3) Identifier et faire part de ses besoins (3/4)

A la troisième étape, on s’attaque au nerf de la guerre : nos besoins. Il s’agit de relier l’émotion ressentie au besoin dont elle émane. A l’image d’un voyant lumineux sur un tableau de bord, l’émotion signale un besoin satisfait ou insatisfait. Nier ou réprimer nos émotions revient à nous couper du besoin sous-jacent, et nous exposer à des réactions parfois destructrices. Apprendre à identifier nos besoins est la première étape, pour pouvoir ensuite les communiquer à notre interlocuteur.

Identifier le besoin qui nous meut, c’est remonter, tel un saumon, à la source du sentiment que nous avons pris le temps d’observer. Seule une compréhension approfondie de nous-mêmes nous permet d’exprimer notre besoin de manière constructive. Les besoins touchent à notre humanité commune. Parler de ses besoins requiert de s’écouter en profondeur et d’avoir une grande bienveillance mutuelle.

4) Demander sans exiger (4/4)

La quatrième et dernière étape consiste à formuler une demande, c’est-à-dire à proposer une piste pour répondre ensemble au(x) besoin(s) de chacun. C’est bien une demande et non une exigence. Le but est que la discussion aboutisse à un dialogue.

 

Un exemple, s’il vous plaît !

Annabelle est la manager de Gaston. Depuis quelques semaines, il arrive tard et repart tôt. Elle le sent démotivé et se demande que dire.

CE QU’ANNABELLE AURAIT DIT AVANT DE LIRE CET ARTICLE

« Gaston, toujours en retard, quel fainéant tu es ! Tu files vraiment un mauvais coton. C’est la dernière fois que je te reprends. »

CE QU’ANNABELLE VA DIRE APRES AVOIR LU CET ARTICLE

« Gaston, je constate que tu arrives plus tard que d’habitude. On ne te voit plus lors de la pause café avec l’équipe (=OBSERVATION). Je suis inquiète (=SENTIMENT). J’ai besoin de comprendre pourquoi, d’avoir un éclairage (=BESOIN). Est-ce que l’on peut se prendre un temps pour en discuter (=DEMANDE) ? »

A défaut de connaître la réponse de Gaston, on peut imaginer que celui-ci sera réceptif à l’attention d’Annabelle qui prend le temps de parler en vérité avec lui. C’est une marque d’estime, et les chances de désamorcer un conflit sont fortes.

« J’ai mis très longtemps à réellement comprendre cette notion [de demande] », confie Véronique Gaspard, formatrice en CNV. « Demander, c’est offrir à l’autre la chance de contribuer [à répondre à nos besoins]. »

Conclusion

 

Nous aurions dû vous avertir en début d’article, la CNV est une perle ! Cela dit, elle demande un apprentissage et donc de la pratique. Alors armez-vous de patience. Et voici quelques conseils pour débuter au mieux dans la CNV :

  • Débuter par un exercice d’introspection pour identifier les situations qui génèrent régulièrement des sentiments négatifs.
  • S’entraîner en silence : dès que vous serez en situation d’inconfort, déroulez intérieurement, dans votre tête, les 4 étapes OSBD
  • Travaillez votre écoute : apprendre à écouter pour comprendre, et non pour répondre

Références

  • Jessica Berthereau, ÉCOUTONS-NOUS LES UNS LES AUTRES : OUI, MAIS PAS SI FACILE, Les Echos Week-end, Mars 2019 [Consulté en Décembre 2019]

https://www.declic-cnveducation.org/assets/Uploads/20190329-ECWE-CNV2.pdf

  • Lauranne Provenzano, Communication non-violente : rétablissez le dialogue dans votre PME [en ligne], Chef d’entreprise, Février 2017 [Consulté en Décembre 2019]

https://www.chefdentreprise.com/Thematique/rh-management-1026/Breves/Communication-non-violente-retablissez-dialogue-dans-votre-PME-313349.htm

  • Auteur anonyme, Un blog sur la Communication Non-Violente, 2019 [Consulté en Décembre 2019]

http://cnv-apprentiegirafe.blogspot.com/