En 2025, l’industrie agroalimentaire se trouve à la croisée des chemins, confrontée à des défis de plus en plus complexes. Entre les attentes croissantes des consommateurs pour des produits toujours plus durables et les nouvelles régulations visant à renforcer la sécurité alimentaire et réduire le gaspillage, les entreprises doivent s’adapter et revoir leurs modèles de production. En parallèle, les chaînes d’approvisionnement mondiales sont de plus en plus vulnérables, perturbées par des événements climatiques extrêmes et des tensions géopolitiques, entraînant des hausses de coûts et des difficultés d’approvisionnement.
Dans cet environnement complexe, la digitalisation et l’adoption de technologies avancées par les entreprises deviennent des leviers essentiels pour améliorer la traçabilité des produits, optimiser leurs flux logistiques, maîtriser les coûts de revient et sécuriser les chaînes d’approvisionnement. C’est pourquoi la capacité des éditeurs de solutions ERP, autant que celle des entreprises, à innover, à s’adapter aux nouvelles régulations, et à anticiper les attentes des consommateurs sera cruciale.
Les enjeux du secteur de l’agroalimentaire
Les entreprises agroalimentaires évoluent dans un cadre exigeant où sécurité, conformité et durabilité s’imposent comme des priorités incontournables. Cette section explore les défis majeurs auxquels elles font face pour répondre à ces attentes croissantes.
Traçabilité, sécurité et conformité réglementaire
Les aspects primordiaux de sécurité et respect des normes qui régissent le secteur de l’agroalimentaire concernent :
👉 La gestion de la traçabilité et de la qualité : Il est aujourd’hui indispensable de garantir une traçabilité complète de l’origine des matières premières aux produits finis, ainsi que des contrôles qualité à chaque étape de la chaîne de production.
Exemple : garantir la bonne traçabilité des lots de matières premières achetées pour garantir l’origine et mieux valoriser les produits aux clients
👉 La conformité aux normes et régulations : De nombreuses normes doivent être respectées et les outils doivent permettre les audits et la gestion des contrôles de sécurité alimentaire. La conformité aux standards comme HACCP (Hazard Analysis of Critical Control Point – système permettant de garantir la sécurité alimentaire) est imposée par les autorités. Ces régulations évoluent fréquemment et obligent les entreprises à adapter leurs processus de manière continue.
Exemple : un de nos clients achète des produits durables et certifiés. Ce système de certification garantit la durabilité et la traçabilité des matières premières en imposant certaines règles que l’entreprise doit suivre. Ainsi, notre client est audité par les organismes certifiants pour s’assurer que les normes établies sont respectées.
👉 Le contrôle des allergènes : Il est nécessaire de suivre et de gérer les allergènes dans les produits pour répondre aux réglementations et aux attentes de sécurité des consommateurs. Cela impose des précautions supplémentaires pour éviter la contamination croisée et garantir la sécurité des produits.
👉 Les risques sanitaires et gestion de crise : Il est indispensable de disposer de systèmes de traçabilité pour faciliter les rappels de produits et permettre une réponse rapide en cas de crise sanitaire ou contamination.
Gestion des ressources et des coûts
Cette section inclut la gestion des matières premières, des stocks et des coûts pour optimiser l’utilisation des ressources et assurer la rentabilité grâce à :
👉 La gestion des stocks et des approvisionnements en adaptant les flux aux variations de la demande pour éviter les pertes, en tenant compte de la périssabilité des produits.
Exemple : dans de nombreux cas, les contrats avec les fournisseurs ou clients s’étalent sur plusieurs mois et se signent en amont des premières livraisons. La gestion des stocks et des approvisionnements est primordiale pour garantir, d’un côté, que les usines ne soient pas saturées mais qu’elles puissent, d’un autre côté, gérer toutes les commandes qui leur sont demandées, vis-à-vis des prévisions de commandes entrantes / sortantes mais aussi de leurs capacités de production.
👉 La gestion des coûts et des marges en optimisant les coûts de production en suivant les variations de prix des matières premières et en ajustant les marges en temps réel.
Exemple : mise en place d’un rapport permettant d’anticiper les hausses et baisses du marché ce qui permet à l’entreprise de définir, selon des estimations basées sur l’évolution du marché, ses coûts et ses marges.
👉 La gestion des formules et recettes en adaptant les recettes en fonction des ressources disponibles et des exigences de production. La variabilité de disponibilité des matières premières nécessite un ajustement constant des recettes produit, parfois complexes, sans pour autant altérer la qualité du produit final.
Durabilité et gestion des impacts environnementaux
L’engagement environnemental et de la réduction des déchets se traduit par :
👉 Un suivi de la durabilité et la réduction du gaspillage alimentaire : les entreprises agroalimentaires s’attachent à réduire les pertes tout au long de la chaîne de production, à optimiser les emballages, et à adopter des pratiques plus durables pour répondre aux attentes des consommateurs et des régulateurs.
Exemple : gestion des achats de produits durables
👉 Une adaptation des approvisionnements face au changement climatique : Les entreprises doivent adapter les chaînes d’approvisionnement pour faire face aux aléas climatiques et aux pénuries potentielles, en prévoyant des sources alternatives et en ajustant les capacités de production.
Logistique et gestion des chaînes d’approvisionnement
Enfin, la complexité logistique et les défis liés à la distribution des produits alimentaires amènent les entreprises agroalimentaires à :
👉 Gérer une logistique et une distribution complexe en prenant en compte les spécificités de transport (réfrigération, délais) et les réglementations d’import-export, tout en optimisant la logistique pour réduire les coûts et garantir la qualité.
Exemple : produits à garder au frais, transport Kacher avec certificat de lavage, transports multi-modaux, bateau avec brouettage, organisation de tournées…
👉 Anticiper les impacts de la saisonnalité et les fluctuations de la demande : Anticiper les variations saisonnières et les pics de demande pour ajuster la production et les approvisionnements, et ainsi assurer la continuité du service.
Exemple : le secteur des graines est fortement impacté par la saisonnalité, non pas de la demande mais de la production. A titre d’exemple, le colza est récolté au début de l’été (en fonction des régions) alors que la demande est toute l’année. Les rendements dépendent des conditions climatiques tout au long du cycle de la plante. Ainsi, l’entreprise doit sans cesse adapter ses chaines d’approvisionnement en trouvant d’autres fournisseurs capables de livrer les matières premières nécessaires à la production.
En résumé, les entreprises agroalimentaires doivent jongler entre des contraintes internes, centrées sur l’optimisation de leurs processus, et des contraintes externes, souvent imposées par des régulations ou des conditions environnementales. Autre conclusion importante, les différents enjeux listés sont totalement liés les uns aux autres, ce qui impose aux entreprises de les traiter de façon globale.
Voyons maintenant comment les solutions ERP aident à gérer ces défis, en offrant des outils de gestion adapté au le secteur.
La réponse des ERP aux enjeux du secteur agroalimentaire
Il existe aujourd’hui des ERP développés spécifiquement pour répondre aux enjeux du secteur agroalimentaire. Parmi eux, nous citerons :
- RADAR Actemium Agri
- VIF Software
- Infologic Copilote
- Infor CloudSuite Food & Beverage
Dans le cadre de la rédaction de cet article, nous avons pu échanger avec Actemium Agri, Business Unit de VINCI Energies (avant Radar Automation), avec qui nous avons coopéré dans l’implémentation de leur logiciel Operra chez un des plus importants groupes agro-alimentaire français. Voici un concentré de notre entretien.
Quels sont, selon vous, les principaux enjeux du secteur aujourd’hui et dans le futur ?
La durabilité et la transition écologique
Le suivi de la durabilité s’exprime déjà très fortement dans le secteur des biocarburants par une réglementation européenne visant à encourager l’utilisation des matières premières durables. Le résultat se traduit par un suivi méticuleux des valeurs bas carbone par lot ; des primes GES et des bilans massiques.
On peut se poser la question suivante : est-ce que l’exemple des biocarburants va se propager dans les autres secteurs de l’industrie agro-alimentaire ?
Par exemple, en France, l’élevage représente 45,5 MT d’eq CO2, soit environ 11% des émissions de GES émises par la France. L’alimentation animale contribue, selon les espèces, entre 50% à 70% de l’impact GES global de l’élevage. Ainsi, la mobilisation de la nutrition animale est essentielle pour décarboner l’élevage. Le secteur agricole doit diminuer de 46% ses émissions GES d’ici à 2050, et de16% d’ici à 2030 par rapport à 2020.
Les entreprises du secteur sont, on le voit, confrontées à des enjeux majeurs en matière d’impact environnemental, notamment sur la réduction du niveau de CO₂ et méthane. Le suivi des valeurs GES des matières premières dans l’achat et l’approvisionnement et leurs origines exige des fonctionnalités supplémentaires dans les applications informatiques. Des nouvelles solutions pour optimiser les formules (recettes) et adapter les étiquettes pour déclarer les niveaux de GES sont élaborées et mises régulièrement en production.
Cette évolution risque effectivement de se propager, à court terme, dans d’autres secteurs agro-alimentaire.
Le changement continu de la législation et des réglementations
👉 La réglementation EUDR et la traçabilité des matières premières
Une autre grande problématique du secteur est la mise en application du règlement EUDR visant à éviter la déforestation importée. Initialement prévue au 1er janvier 2025, l’entrée en vigueur a été repoussée à 2026, mais les modalités restent floues. Concrètement, pour un nombre limité de produits, comme le soja, l’huile de palme et les viandes bovines, il sera nécessaire d’avoir une certification garantissant qu’ils proviennent de terres non déforestées depuis 2020.
Une question se pose alors : Est-ce que la réglementation Européenne RDUE va obliger les opérateurs à suivre la traçabilité en détail, des déclarations de diligence raisonnée de l’appro jusqu’à la livraison des produits finis ? Ou les contrôles pourront-ils être limités aux frontières européennes ou aux douanes ? Si non, il y aura des répercussions très impactantes sur les systèmes informatiques et l’automatisation industrielle.
Le secteur se retrouve aujourd’hui confronté à un flou réglementaire important, chaque pays devant mettre en place ses propres modalités dans le cadre des limites fixées par l’Union européenne. Les associations de fabricants européens d’aliments pour animaux, comme FEFAC Europe, travaillent activement sur ces questions.
En tant que membre de ces fédérations, Actemium suit ce sujet de très près et entretient une communication étroite avec ses clients.
👉 La dématérialisation et la digitalisation
La réglementation sur la dématérialisation des factures est plus claire. Toutefois, chaque client adopte une approche différente, et il est essentiel de suivre de près leurs choix pour adapter les solutions ERP en conséquence. Au-delà de la facture électronique, certaines entreprises intègrent cette transition dans une politique plus large de digitalisation : automatisation des contrôles de facturation des achats, optimisation des processus administratifs, etc.
Actemium s’adapte à ces besoins en échangeant régulièrement avec ses clients majeurs.
Les achats et les approvisionnements : chercher à limiter au maximum le risque avec des marchés de matières premières très volatiles
L’un des grands défis à venir pour le secteur est la grande instabilité des matières premières. La volatilité des prix pousse de plus en plus d’acteurs des chaines agro-alimentaires à chercher des systèmes de contractualisation permettant de fixer des prix sur des périodes de 6 à 12 mois.
Cependant, pour un fabricant d’aliments, la situation est complexe : il est difficile de complètement sécuriser ses prix de revient sur ses produits finis pour des périodes futures. Pour un grand nombre de produits, il n’est pas possible de négocier des contrats à terme avec un prix fixé ou d’acheter des futures ou options.
Ce n’est donc pas évident de proposer à ses clients des contrats à terme à prix fixe pour les aliments sans augmenter les risques sur les positions des matières premières par la volatilité des prix.
Cette tendance impacte fortement les ERP, qui doivent intégrer des fonctionnalités avancées pour le suivi des formules, la gestion des contrats de vente, et le contrôle des marges. Cela devient un véritable outil d’aide à la décision pour les directions financières, notamment pour répondre aux questions suivantes :
- Pourquoi la marge sur les ventes à terme a-t-elle diminué dans le temps ?
- L’augmentation des prix des matières premières a-t-elle été correctement répercutée dans les prix de vente des produits finis?
- Quelle est l’incidence des changements de formule pendant la période entre la signature du contrat à terme et l’exécution sur la marge initialement prévue?
Les nouvelles exigences dans ce domaine nécessitent une collecte et une historisation plus poussée des données dans des data warehouses, avec des outils de Business Intelligence (BI) pour produire des rapports et des graphiques. Ces outils permettent aux entreprises de suivre leur position achat/vente et leur exposition aux marchés à terme, afin de mieux gérer les risques financiers.
Qu’est-ce qui distingue un ERP agroalimentaire d’un ERP généraliste ?
L’ERP agroalimentaire présente plusieurs spécificités majeures :
- Durabilité : intégration des contraintes environnementales et des valeurs GES.
- Gestion des marchés à terme : module avancé ou spécifique pour gérer la volatilité des matières premières.
- Flexibilité accrue : indispensable dans un secteur où les changements de dernière minute sont fréquents.
- Expertise sectorielle : l’éditeur conseille ses clients en s’appuyant sur les meilleures pratiques observées chez d’autres acteurs.
- Développements réguliers : évolutions spécifiques en fonction des besoins du secteur.
Les entreprises agroalimentaires doivent gérer une quantité massive de données et adapter en permanence leurs décisions : modification des contrats, changement du lieu de livraison, ajustements tarifaires… Cette flexibilité est difficile à gérer avec un ERP généraliste, qui nécessite souvent plus d’interventions humaines.
Par ailleurs, le secteur agroalimentaire est soumis à des réglementations et habitudes commerciales spécifiques, comme les arbitrages particuliers aux produits dérivés de matières premières notées sur le MATIF (comme le blé). Avec un ERP standard, il faut paramétrer chaque contrainte, alors que les ERP spécialisés intègrent ces fonctionnalités nativement, notamment pour la gestion des contrats et commandes.
Tous les ERP disposent d’un module qualité (échantillonnage, analyses, liaisons avec des laboratoires externes), mais dans l’ERP agroalimentaire, le lien entre la qualité, les prix d’achat et la formulation des recettes, est beaucoup plus poussé. Les prix peuvent être ajustés en fonction des résultats d’analyses, ce qui nécessite des formules complexes de fixation des prix sur contrat.
Comment Actemium s’organise-t-il pour répondre aux besoins du secteur ?
Actemium fonctionne avec un système de récupération des demandes clients, permettant d’identifier les besoins récurrents. Les développements sont réalisés au sein de l’équipe, structurée en plusieurs pôles :
- Développement
- Business Analysis (analyse des besoins clients)
- Système de ticketing
- Réunions internes avec les responsables produits
L’entreprise adopte une méthodologie agile, avec des sprints de deux semaines.
Les demandes des clients sont priorisées en interne, avec parfois des accords de développement spécifiques.
Enfin, une roadmap des évolutions est partagée avec les grands clients via des démos régulières des nouvelles fonctionnalités. Un wiki est également mis à disposition pour centraliser les ressources et documentations.
Ce qu’il faut retenir de ce décryptage
Face à des enjeux toujours plus complexes, les entreprises agroalimentaires doivent allier performance opérationnelle, conformité réglementaire et engagement environnemental.
Une approche globale et cohérente est essentielle pour traiter ces défis interconnectés, en s’appuyant sur des solutions/outils de gestion capables d’unifier et d’optimiser l’ensemble des processus.
Dans ce contexte, les ERP jouent un rôle clé en offrant des réponses adaptées aux spécificités du secteur, tout en accompagnant les entreprises dans leur transformation et en renforçant leur résilience dans un environnement en constante évolution. Les ERP spécifiques au secteur, comme Actemium, font preuve d’agilité en étant en permanence à l’écoute de leurs clients afin de proposer des évolutions régulières et des fonctionnalités avancées pour répondre aux contraintes spécifiques du secteur.