Guillaume Messalati 5 octobre 2021

Commençons par briser les mythes

 

Ces principes sont soumis à de nombreux préjugés, justifiés et amplifiés à tort par un manque d’information. Nous vous proposons donc de partir à la chasse à certains de ces mythes pour en finir avec l’idéologie du « c’est la même chose » ou « c’est trop dur ».

Mythe 1 : « La gestion de portefeuille, c’est une pratique complexe et difficile à appliquer, nous ne maitrisons pas assez la gestion de projet pour la mettre en pratique et notre organisation fonctionne en silos… Nous manquons de maturité pour gérer nos projets et programmes en portefeuille »

Faux : si vous savez gérer plusieurs projets/programmes en même temps, vous saurez gérer un portefeuille de projets/programmes, mais pas forcément dans tous les domaines. Commencez là où c’est plus simple : planification ou priorisation du portefeuille, suivi global du portefeuille. Ajustez ensuite les actions en fonction de votre maturité.

Mythe 2 : « La gestion de portefeuille, ce n’est que de la gestion de plusieurs projets, les indicateurs de suivi sont les mêmes mais avec un niveau d’agrégation différent. Finalement, il n’y a pas de grande différence entre gestion de projet, de programme ou de portefeuille. »

Faux : il existe différents processus de gouvernance, types de suivi de performance, différentes compétences spécifiques, etc. Mais ça, vous le savez déjà si vous avez lu notre article sur la gestion de projet, de programme et de portefeuille.

 

L’apprentissage par l’exemple : intéressons-nous au suivi de la performance

 

Afin de bien cerner les différences entre ces 3 modes de fonctionnement, intéressons-nous à un cas pratique en mettant l’accent sur un domaine : le suivi de la performance. Que signifie suivi de la performance au niveau de son projet, de son programme et de son portefeuille ?

 

Au niveau du projet :

Quoi (que suit-on ?) : avancement du projet versus sa planification (coûts, délais, qualité, risque, périmètre).

Quand (quand et par quel biais le suit-on ?) : revues hebdomadaires et/ou mensuelles de la performance en Comité Projet.

Qui (qui le suit ?) : chefs de projet et chefs de chantiers.

Comment (qu’est-ce qu’on regarde ?) : état d’avancement et financier du projet, indicateurs budgétaires, prévisions, risques et enjeux, suivi des litiges, etc.

 

Au niveau du programme :

Quoi : avancement du programme versus sa planification (coûts, délais, qualité, risque, périmètre, gains d’échelle).

Quand : revues mensuelles ou bimensuelles de la performance du programme en Comité Directeur Programme.

Qui : directeur programme et PMO.

Comment : tableau de bord avec indicateurs de performance macro, rapport de performance, risques principaux et actions engagées, tendances budgétaires globales, prévisionnel, etc.

 

Au niveau du portefeuille :

Quoi : la performance globale de la réalisation des objectifs (coûts, indicateurs de la valeur, capacité globale (budget portefeuille), risques globaux, interdépendance des projets/programmes (Core Models), équilibre du portefeuille, etc.)

Quand : revues a minima biannuelles au Comité de Gouvernance ou Comité Stratégique ou Comité de Direction.

Qui : gestionnaire du portefeuille / Sponsor à la Direction Générale / Directeurs de programme

Comment : rapports de performance, tableaux de bord exécutifs, analyses de capacité, tendances, entrées/sorties de projets et/ou programmes. On cherche à identifier, catégoriser, contrôler, évaluer, sélectionner, prioriser, optimiser, équilibrer, autoriser et mettre fin aux composantes du portefeuille.

 

Faites simple : commencez par vous poser les bonnes questions

 

N’essayez pas à tout prix de partir dans un modèle d’organisation que vous ne maitrisez ou ne connaissez pas. Faites un état des lieux et ajustez de manière incrémentale en vous interrogeant sur la nature de vos activités.

 

Mon projet devient-il trop gros ou complexe au point que je doive en déléguer une partie à un ou plusieurs chefs de projet ?

Le cas échéant, c’est que vous êtes sur un programme avec une gestion à l’échelle (budget, technicité…). Le programme fournit un cadre qui met de l’ordre dans les activités, en permettant une bonne gestion de la complexité et du risque. Il sert à gérer, organiser, contrôler et harmoniser les changements afin que le résultat produit corresponde aux objectifs stratégiques fixés. Il comprend : le management des interfaces entre projets, la priorisation des ressources et globalement une réduction dans l’effort de management. A ce sujet, pensez notamment à jeter un œil à notre article sur les moyens d’éviter la dérive de vos projets !

 

Est-ce que mes ressources projet sont mutualisables et ainsi me permettent de réaliser des économies ?

Le programme est aussi une source d’économies : passage d’appels d’offres plus importants, développements de composants réutilisables sur plusieurs projets, mutualisation des coûts publicitaires ou de communication, etc. Autant d’exemples qui justifient la gestion en mode programme.

 

Mes projets ou programmes partagent-ils un objectif commun ?

Les projets ou programmes auxiliaires qui composent un programme mais qui ne partagent pas des objectifs communs ou complémentaires, ou qui ne participent pas à l’atteinte des mêmes objectifs, ou pour lesquels le partage se limite à la technologie ou aux parties prenantes sont souvent mieux gérés sous forme de portefeuille que de programme.

 

« Ne cherchez pas à tout prix à rentrer dans le modèle parfait car il n’existe pas »

 

Ces réponses, d’ordre général, permettent de faire rapidement émerger les principes directeurs des différents modes de gestion de ses activités. Néanmoins, restez pragmatique en visant un mode de fonctionnement simple et pratique. Ne cherchez pas à tout prix à rentrer dans le modèle parfait car il n’existe pas. Entre un projet et un programme par exemple, la philosophie de pilotage reste relativement similaire ; la différence la plus flagrante est la nécessité d’organiser les activités des chefs de projets entre elles dans la logique d’un pilotage de programme.

Gardez également à l’esprit que les composantes d’un portefeuille sont quantifiables (c’est-à-dire catégorisées, évaluées, priorisées et autorisées). Ces éléments peuvent être liés ou non, indépendants ou interdépendants et posséder des objectifs communs ou non. De ce fait, ils sont en compétition pour obtenir une part d’une quantité limitée de ressources. La part allouée à ces composantes doit être pilotée par les objectifs stratégiques tout en tenant compte des disponibilités de l’entreprise. Ce pilotage aura deux finalités principales : optimisation et équilibre.

 

Pour conclure

 

En synthèse, un portefeuille a une finalité éminemment stratégique et déploie la vision à long terme d’un groupe. Un projet existe dans une logique ad hoc, à vocation plus opérationnelle et sert à mesurer l’avancement vers un objectif bien défini. Le programme s’appuie sur les méthodologies propres aux deux et les conjugue pour agir comme un multiplicateur de valeur ; il a une valeur business et c’est un outil de pilotage.

A votre tour de faire l’essai. Saurez-vous identifier ce qui relève du projet, du programme ou du portefeuille chez vous ?